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Sortie du DVD de Notre Monde

Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas Lacoste
Rassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace d’expression pour travailler, comme nous y enjoint Jean–Luc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore qu’un libre espace de parole, Notre Monde s’appuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
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© Passant n°29 [juin 2000 - juillet 2000]
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Cinéma


En ces temps de festivals, celui de Cannes et plus modestement, pour l’instant, Noir-Ouest, une chronique cinématographique s’efforçant d’être digne de ce nom se doit de restituer la dimension historique du cinéma. Fort à propos, deux films appartenant au patrimoine mondial du genre noir ressortent sur les écrans. L’un des atouts majeurs de Gun Crazy (1950) est de faire participer directement le spectateur au road-movie du couple de gangsters. Les scènes parmi les plus fortes sont en effet filmées comme si nous étions sur la banquette arrière de la voiture, participant au braquage d’une banque en un seul plan séquence resté fameux, négociant les virages au plus serré, baissant la tête pour éviter les balles policières. Les deux amants sont évidemment aussi passionnément unis dans le crime que dans l’amour et c’est une des forces du film que de montrer leur attirance fatale, que la vigueur de leurs baisers attise encore. Quand on saura enfin que Joseph Lewis, le réalisateur, fut paraît-il financé par une fratrie de gangsters notoires, les frères King, qui trouvèrent là une méthode de blanchiment de l’argent salement gagné, on pourra y voir comme un clin d’œil à la toute puissance du crime magnifiée par l’arme de l’art.

On reconnaît toujours Lee Marvin à sa chevelure de neige et à sa mâchoire puissante. Il promène sa silhouette dégingandée et vigoureuse, dans des costards cravates impeccables, gris ou noirs tout au long du Point de non-retour (1967) de John Boorman. Ah ! Lee Marvin ! L’espace me manque et puis, ce n’est pas l’objet unique de cette chronique et pourtant… Mauvais garçon à la tenue plus que négligée dans Un homme est passé de Sturges, où il remettait sans cesse les pans de sa chemise dans son pantalon, entre deux tabassages ; brigand psychopathe enveloppé dans son cache-poussière brandissant son fouet et exhibant d’une curieuse manière ses pouces dans L’homme qui tua Liberty Valance de Ford ; chef de mercenaires devenu justicier, le front ceint d’un chapeau identique à celui de la police montée canadienne dans Les Professionnels de Richard Brook. Bref, pour revenir au film de Boorman, Marvin y interprète un mauvais garçon décidé à récupérer l’argent que lui a volé son complice, après l’avoir laissé pour mort : fut-ce en liquidant une bonne partie des truands de Los Angeles et en décapitant au passage l’Organisation locale. Marvin est une force criminelle qui va. La grande réussite du film de Boorman, réalisateur anglais ayant tourné ce film aux States, c’est d’avoir ainsi renouvelé les canons du film noir américain tout en y intégrant une jolie dose d’interrogations existentielles façon cinéma européen : architecture oppressante des buildings modernes (ou de la vieille prison d’Alcatraz), récit peut-être rêvé à la manière de la Jetée.

Quelque mots sur deux films sortis, eux cette année : Libres comme le vent, de Gavin O’Connor où une mère et sa fille, à peine adolescente, tracent la route, leur route à travers l’Amérique. Coalisées contre les mecs, mais parfois aussi tout contre eux, elles sont épatantes et en particulier Janet McTeer, la mère : on n’oubliera pas de sitôt les leçons données à sa fille pour embrasser les garçons, et qu’importe si le scénario ne suit pas toujours les voies cachées qu’elles empruntent pour affirmer leur indépendance triomphante.

Comme un garçon, elle voulait porter un blouson, séduire les filles, cacher sa vraie nature et même en changer. Hélas, cette vérité ne se fera pas chair jusqu’au bout, mais l’héroïne de Boys don’t cry, Hilary Swank, interprète elle aussi un personnage superbe, tombé au champ du déshonneur de l’Amérique profonde.


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