Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace d’expression pour travailler, comme nous y enjoint Jean–Luc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore qu’un libre espace de parole, Notre Monde s’appuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
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© Passant n°34 [avril 2001 - mai 2001]
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D’ici, on voit la mort
…toutes les mortsPar Sergio Guagliardi
Je n’ai jamais entendu monsieur D. se plaindre de la saloperie qui lui bouffait les entrailles. Cancer. Petit sourire : « ça va, monsieur le directeur, faut bien… ». C’est le « faut bien » que je n’ai jamais compris : dignité ? résignation ? politesse ? En cinq ans, personne n’est venu le voir. A quoi ça peut bien servir, de voir ? Je l’aimais bien, ce type, je ne lui ai pas assez dit.
Elle est arrivée, accompagnée par son fils et sa belle-fille. Ils l’ont habillée en dimanche, pour faire bonne impression. « Tiens-toi, mamie, sinon ils te prendront pas »… Entretien dans mon bureau. Questions. Le jeu des enfants : mentir, vendre l’entrée : « elle vous embêtera pas, vous savez, elle reste dans son coin, et pour le moment elle est propre ». Le jeu du directeur : comprendre les raisons du placement (maison à vendre, engueulade entre enfants, entrée dans la démence), lutter pour effacer de son esprit l’idée qu’on lui cache quelque chose, essayer de savoir si la vieille femme qui tient son sac à main (vide) sur ses genoux est d’accord pour entrer (mais qui peut être d’accord, sauf à fuir solitude ou mauvais traitements ?), vendre son établissement sans tricher sur les volets pourris, l’ascenseur asthmatique, les couloirs longs comme une agonie. Je m’adresse obstinément à ces yeux baissés, sans paraître écouter les réponses que font, à sa place, le fils et la belle-fille. Ma mère, si je dois être aussi brutal que ces deux-là, va-t-en avant. Jeu de rôle, j’emploie les grands mots gérontologiquement corrects (« projet d’établissement, soins relationnels, prise en charge), elle ne m’écoute pas. Je suis à côté d’elle, je veux qu’elle voie ma tête, j’essaie de lui parler à l’oreille, sans hurler. Les deux autres : « Vous pouvez y aller, elle entend plus rien, c’est à peine si elle nous reconnaît »… L’adjointe entre, se débrouille pour éloigner les deux accompagnateurs, papiers, financements, sécu, traitements… Elle relève la tête. Me regarde : « Vous savez, monsieur le directeur, je viens chez vous pour mourir »…
« C’est la compagnie du chauffage, monsieur le directeur, ils ont mis je sais pas quoi dans les tuyaux, et la nuit ça m’empoisonne, tenez, regardez, j’ai des piqûres partout »… Délire. Son accent espagnol jamais parti. Sa chaîne stéréo « combinée » large comme un bureau et la musique qu’elle aimait, Mariano, Guéthary, Lopez, Moreno. Personne ne voulait l’accueillir, en sortant de sa résidence pour personnes âgées où elle inquiétait voisines et responsable, soupçonnées d’être complices. « Vous qui avez l’habitude de la psychiatrie, monsieur le directeur, vous allez bien nous la prendre… ». Oui, j’ai pris. Je lui ai dit que j’étais exorciste et écrivain, j’ai tracé un jour dans sa chambre un grand cercle de talc, lui ai remis un texte repoussant les mauvais esprits dans une petite bourse en tissu. Ca a marché presque sept ans, la thérapie sauvage. Je préférais ça aux gouttes d’halopéridol. Elle m’aimait bien. Moi aussi. Pour le talc, je l’ai balayé tout de suite, pour que ça reste un secret entre nous… et que les femmes de service ne s’étonnent pas trop de mes pratiques.
Je le jure, j’ai tout vu. J’ai vu des braves gens bouffés par le remords s’accrocher à nous comme un inspecteur de la DDASS au cadrage budgétaire que lui a fixé son chef de service, j’ai vu un homme venir tous les jours dormir une heure entre midi et deux dans le lit de sa mère qui le regardait sans rien dire, immobile dans son fauteuil, j’ai vu deux petites nièces me demander deux heures après la mort de la tante où étaient les six culottes qu’elles avaient achetées la semaine dernière vu qu’elles n’en retrouvaient que cinq et je leur ai répondu que la sixième était sur leur tante, je me suis permis de foutre dehors une famille qui me demandait si je pouvais leur rendre les dents en or de la morte, vu qu’elles avaient aidé à les payer et qu’ils avaient été bien bons d’équiper quelqu’un déjà âgé à qui ça allait pas servir à grand-chose, j’ai vu un pauvre homme que sa fille a fait sortir pour le placer à l’hôpital psy parce qu’à l’époque là c’est la sécu qui payait, je vois que parfois je suis bien fatigué et que je me demande bien pourquoi.
Tu vois, ça sent la mort partout, chez nous, plus que la mort, le temps de l’usure, la lutte pour lever un bras, les mouvements lents et maladroits, la protection entre les jambes, comme on dit, (certaines personnes âgées disent qu’elles sont « garnies »), et voilà quand même que certains vivent là, rites, habitudes, cérémonies, vie sociale malgré tout, haines, amours, mesquineries, tendresse, tout ce petit monde est dehors, ailleurs, déjà parti. Pas beaucoup de voix qui s’élèvent contre la vie que l’on fait mener à ceux qui n’ont plus guère de temps à vivre. C’est le combat que nous menons.
Politiques frileux à la recherche de causes à défendre qui paient socialement (l’humanitaire, la lutte anti-tabac, la journée mondiale des femmes), gestionnaires managers en santé (de l’économie), administrateurs soucieux de leur dévotion aux dieux de la réglementation, tous ceux-là sont bien entendu à plaindre… : ils ne savent même pas qu’un jour ils mettront un bavoir comme les bébés à leur maman qu’ils n’ont jamais cessé d’être, dans leur recherche du lait de pouvoir. Mais, et j’espère que tu m’en voudras pas, sinon tant pis, il faut bien dire que le sempiternel citoyen dont on nous rebat l’entendement ne se remue pas trop non plus. Je ne les entends pas, les candidats classiques costume croisé gauche-droite, les alternatifs caban bicyclette, les politiques autrement, les associations de grande proximité (en fait proches d’elles-mêmes), les intellectuels (eux ne meurent pas, c’est bien connu, ou alors en étranglant leur femme (Althusser) ou se suicidant la tête dans un sac en plastique (Bettheleim) ça a plus de classe), les syndicats bureaucratiques luttant pour le statut sans se demander aussi comment virer ceux qui (école, administrations, santé) sont indignes de travailler au service du public, les artistico tendance, j’entends personne dans le grand silence glacé des maisons de retraite. Il y a sur les murs un épais voile de velours fané qui empêche d’entendre les cris.
Un jour que j’étais encore plus jeune que maintenant, c’est dire, un chef de secteur en psychiatrie, grand joueur de rugby et donc honnête homme, m’avait surpris en me disant qu’au fond du fin fond du fond, tout bien pesé, réfléchi, tous comptes faits et refaits, les meilleurs soignants, les thérapeutes les plus inspirés, les moins dangereux in somma, c’est ceux qui aimaient les gens. Ben merde !, pensais-je alors de toute la puissance d’interrogation et d’étonnement dont j’étais à l’époque capable : moi qui pensais que seules les longues analyses auto-réflexives sur le questionnement des pratiques et leur mise en jeu dans le rapport à l’autre permettaient de s’en sortir pas trop mal…
J’dis ça aujourd’hui parce que dans les petits matins, dans les salles à manger pleines de fauteuils roulants, dans les salles de bains où tremblent de pauvres corps fatigués, autour des lits où la douleur s’est installée, il y a gens qui rient, des gestes qui aident, des chignons et des blouses qui parlent de la pluie et surtout du beau temps, il y a des gens qui aiment les gens. Un peu, ou beaucoup, ou qui ont le souci de faire semblant, et ça revient au même disait le grand rugbyman…
L’important est de savoir que la plupart de celles et de ceux qui travaillent là, sans illusions, sans jouer les héros dans un feuilleton, sans naïveté, préfèrent quand même aider que laisser tomber, sourire que faire la gueule, faire la gueule s’il faut, penser à leur gosse tout en faisant sérieusement ce qu’il y a à faire, bref être vraiment là, en entier, sans honte de faire un métier où l’on balaie par terre et où on lave les fesses des gens. Pas des anges ou des saintes, sinon tu m’as mal compris, des gens corrects, tout simplement, avec plein de failles mais des edelweiss qui poussent dedans. Ceux que j’aime sont là, pas loin, tant mieux, on n’est jamais trop de vivants.
Il y a les autres, bien sûr, les acariâtres biliaires, les casse-couilles, les qui règlent des comptes, les qui font que la sociologie politique et la psychologie des profondeurs sont impuissantes, bref comme partout, mon bon, quelques imbéciles et quelques vrai(e)s beaufs et beauffettes. Le problème, avec celles et ceux-là, c’est qu’ils
ne comprennent pas l’expression « bon débarras »…
J’arrive au bout de ma diatribe. Je suis fier de travailler là, ni pire ni meilleur qu’un autre, peut-être un peu usé, par moments, et presque par endroits (vers le cœur, si tu vois ce que je veux dire). Juste un mot encore : j’ai depuis longtemps deux ou trois trucs à dire à ceux qui ont une image romantique de la folie (Rimbaud, Van Gogh, Artaud, et compagnie), et désormais, je saurais aussi quoi répondre aux illuminés de la douce vieillesse heureuse et sereine sous son arbre en attendant là fin : Va voir là-bas si j’y suis, d’ici, on voit, et on combat la mort, toutes les morts.
Je n’ai jamais entendu monsieur D. se plaindre de la saloperie qui lui bouffait les entrailles. Cancer. Petit sourire : « ça va, monsieur le directeur, faut bien… ». C’est le « faut bien » que je n’ai jamais compris : dignité ? résignation ? politesse ? En cinq ans, personne n’est venu le voir. A quoi ça peut bien servir, de voir ? Je l’aimais bien, ce type, je ne lui ai pas assez dit.
Elle est arrivée, accompagnée par son fils et sa belle-fille. Ils l’ont habillée en dimanche, pour faire bonne impression. « Tiens-toi, mamie, sinon ils te prendront pas »… Entretien dans mon bureau. Questions. Le jeu des enfants : mentir, vendre l’entrée : « elle vous embêtera pas, vous savez, elle reste dans son coin, et pour le moment elle est propre ». Le jeu du directeur : comprendre les raisons du placement (maison à vendre, engueulade entre enfants, entrée dans la démence), lutter pour effacer de son esprit l’idée qu’on lui cache quelque chose, essayer de savoir si la vieille femme qui tient son sac à main (vide) sur ses genoux est d’accord pour entrer (mais qui peut être d’accord, sauf à fuir solitude ou mauvais traitements ?), vendre son établissement sans tricher sur les volets pourris, l’ascenseur asthmatique, les couloirs longs comme une agonie. Je m’adresse obstinément à ces yeux baissés, sans paraître écouter les réponses que font, à sa place, le fils et la belle-fille. Ma mère, si je dois être aussi brutal que ces deux-là, va-t-en avant. Jeu de rôle, j’emploie les grands mots gérontologiquement corrects (« projet d’établissement, soins relationnels, prise en charge), elle ne m’écoute pas. Je suis à côté d’elle, je veux qu’elle voie ma tête, j’essaie de lui parler à l’oreille, sans hurler. Les deux autres : « Vous pouvez y aller, elle entend plus rien, c’est à peine si elle nous reconnaît »… L’adjointe entre, se débrouille pour éloigner les deux accompagnateurs, papiers, financements, sécu, traitements… Elle relève la tête. Me regarde : « Vous savez, monsieur le directeur, je viens chez vous pour mourir »…
« C’est la compagnie du chauffage, monsieur le directeur, ils ont mis je sais pas quoi dans les tuyaux, et la nuit ça m’empoisonne, tenez, regardez, j’ai des piqûres partout »… Délire. Son accent espagnol jamais parti. Sa chaîne stéréo « combinée » large comme un bureau et la musique qu’elle aimait, Mariano, Guéthary, Lopez, Moreno. Personne ne voulait l’accueillir, en sortant de sa résidence pour personnes âgées où elle inquiétait voisines et responsable, soupçonnées d’être complices. « Vous qui avez l’habitude de la psychiatrie, monsieur le directeur, vous allez bien nous la prendre… ». Oui, j’ai pris. Je lui ai dit que j’étais exorciste et écrivain, j’ai tracé un jour dans sa chambre un grand cercle de talc, lui ai remis un texte repoussant les mauvais esprits dans une petite bourse en tissu. Ca a marché presque sept ans, la thérapie sauvage. Je préférais ça aux gouttes d’halopéridol. Elle m’aimait bien. Moi aussi. Pour le talc, je l’ai balayé tout de suite, pour que ça reste un secret entre nous… et que les femmes de service ne s’étonnent pas trop de mes pratiques.
Je le jure, j’ai tout vu. J’ai vu des braves gens bouffés par le remords s’accrocher à nous comme un inspecteur de la DDASS au cadrage budgétaire que lui a fixé son chef de service, j’ai vu un homme venir tous les jours dormir une heure entre midi et deux dans le lit de sa mère qui le regardait sans rien dire, immobile dans son fauteuil, j’ai vu deux petites nièces me demander deux heures après la mort de la tante où étaient les six culottes qu’elles avaient achetées la semaine dernière vu qu’elles n’en retrouvaient que cinq et je leur ai répondu que la sixième était sur leur tante, je me suis permis de foutre dehors une famille qui me demandait si je pouvais leur rendre les dents en or de la morte, vu qu’elles avaient aidé à les payer et qu’ils avaient été bien bons d’équiper quelqu’un déjà âgé à qui ça allait pas servir à grand-chose, j’ai vu un pauvre homme que sa fille a fait sortir pour le placer à l’hôpital psy parce qu’à l’époque là c’est la sécu qui payait, je vois que parfois je suis bien fatigué et que je me demande bien pourquoi.
Tu vois, ça sent la mort partout, chez nous, plus que la mort, le temps de l’usure, la lutte pour lever un bras, les mouvements lents et maladroits, la protection entre les jambes, comme on dit, (certaines personnes âgées disent qu’elles sont « garnies »), et voilà quand même que certains vivent là, rites, habitudes, cérémonies, vie sociale malgré tout, haines, amours, mesquineries, tendresse, tout ce petit monde est dehors, ailleurs, déjà parti. Pas beaucoup de voix qui s’élèvent contre la vie que l’on fait mener à ceux qui n’ont plus guère de temps à vivre. C’est le combat que nous menons.
Politiques frileux à la recherche de causes à défendre qui paient socialement (l’humanitaire, la lutte anti-tabac, la journée mondiale des femmes), gestionnaires managers en santé (de l’économie), administrateurs soucieux de leur dévotion aux dieux de la réglementation, tous ceux-là sont bien entendu à plaindre… : ils ne savent même pas qu’un jour ils mettront un bavoir comme les bébés à leur maman qu’ils n’ont jamais cessé d’être, dans leur recherche du lait de pouvoir. Mais, et j’espère que tu m’en voudras pas, sinon tant pis, il faut bien dire que le sempiternel citoyen dont on nous rebat l’entendement ne se remue pas trop non plus. Je ne les entends pas, les candidats classiques costume croisé gauche-droite, les alternatifs caban bicyclette, les politiques autrement, les associations de grande proximité (en fait proches d’elles-mêmes), les intellectuels (eux ne meurent pas, c’est bien connu, ou alors en étranglant leur femme (Althusser) ou se suicidant la tête dans un sac en plastique (Bettheleim) ça a plus de classe), les syndicats bureaucratiques luttant pour le statut sans se demander aussi comment virer ceux qui (école, administrations, santé) sont indignes de travailler au service du public, les artistico tendance, j’entends personne dans le grand silence glacé des maisons de retraite. Il y a sur les murs un épais voile de velours fané qui empêche d’entendre les cris.
Un jour que j’étais encore plus jeune que maintenant, c’est dire, un chef de secteur en psychiatrie, grand joueur de rugby et donc honnête homme, m’avait surpris en me disant qu’au fond du fin fond du fond, tout bien pesé, réfléchi, tous comptes faits et refaits, les meilleurs soignants, les thérapeutes les plus inspirés, les moins dangereux in somma, c’est ceux qui aimaient les gens. Ben merde !, pensais-je alors de toute la puissance d’interrogation et d’étonnement dont j’étais à l’époque capable : moi qui pensais que seules les longues analyses auto-réflexives sur le questionnement des pratiques et leur mise en jeu dans le rapport à l’autre permettaient de s’en sortir pas trop mal…
J’dis ça aujourd’hui parce que dans les petits matins, dans les salles à manger pleines de fauteuils roulants, dans les salles de bains où tremblent de pauvres corps fatigués, autour des lits où la douleur s’est installée, il y a gens qui rient, des gestes qui aident, des chignons et des blouses qui parlent de la pluie et surtout du beau temps, il y a des gens qui aiment les gens. Un peu, ou beaucoup, ou qui ont le souci de faire semblant, et ça revient au même disait le grand rugbyman…
L’important est de savoir que la plupart de celles et de ceux qui travaillent là, sans illusions, sans jouer les héros dans un feuilleton, sans naïveté, préfèrent quand même aider que laisser tomber, sourire que faire la gueule, faire la gueule s’il faut, penser à leur gosse tout en faisant sérieusement ce qu’il y a à faire, bref être vraiment là, en entier, sans honte de faire un métier où l’on balaie par terre et où on lave les fesses des gens. Pas des anges ou des saintes, sinon tu m’as mal compris, des gens corrects, tout simplement, avec plein de failles mais des edelweiss qui poussent dedans. Ceux que j’aime sont là, pas loin, tant mieux, on n’est jamais trop de vivants.
Il y a les autres, bien sûr, les acariâtres biliaires, les casse-couilles, les qui règlent des comptes, les qui font que la sociologie politique et la psychologie des profondeurs sont impuissantes, bref comme partout, mon bon, quelques imbéciles et quelques vrai(e)s beaufs et beauffettes. Le problème, avec celles et ceux-là, c’est qu’ils
ne comprennent pas l’expression « bon débarras »…
J’arrive au bout de ma diatribe. Je suis fier de travailler là, ni pire ni meilleur qu’un autre, peut-être un peu usé, par moments, et presque par endroits (vers le cœur, si tu vois ce que je veux dire). Juste un mot encore : j’ai depuis longtemps deux ou trois trucs à dire à ceux qui ont une image romantique de la folie (Rimbaud, Van Gogh, Artaud, et compagnie), et désormais, je saurais aussi quoi répondre aux illuminés de la douce vieillesse heureuse et sereine sous son arbre en attendant là fin : Va voir là-bas si j’y suis, d’ici, on voit, et on combat la mort, toutes les morts.