Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace d’expression pour travailler, comme nous y enjoint Jean–Luc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore qu’un libre espace de parole, Notre Monde s’appuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
Retour
© Passant n°34 [avril 2001 - mai 2001]
© Passant n°34 [avril 2001 - mai 2001]
par Frère Mc Murdo
Imprimer l'articleChronique noire
Pascal Dessaint : On y va tout droit (Rivages/Noir, 382 p., catégorie 7).
Les romans de Dessaint se reconnaissent souvent dès les premières phrases : une ligne d’équilibre délicate à tenir entre la trame, vaguement policière, de la fiction, et le soliloque d’un personnage qui aime à se définir ainsi : « Je me faisais l’effet d’un mec qui n’a jamais cessé de courir à sa perte… Je savais, et cela depuis longtemps, que la vie, c’est des riens qui font tout et un peu n’importe comment ». Ainsi, Emile a 37 ans, une petite amie à qui il tient beaucoup plus qu’elle à lui, ce qui le morfond, une épouse très dépressive qu’il visite régulièrement dans la clinique psychiatrique où elle tente de soigner son mal profond, un pote, Frank, peintre marginal et avec lequel il partage des soirées fort alcoolisées, enfin un chien, Tati, qui disparaît et qu’il passe une partie importante du livre à rechercher. Il est compréhensible qu’il ne soit pas réceptif à l’appel au secours de Mary, la nièce de Frank ; et ce n’est qu’aux derniers chapitres du roman qu’il arrive enfin à émerger pour mettre à mal le vilain personnage, cause des malheurs de Mary. Ballotté de personnages en situations plutôt loufoques, Emile trace un parcours d’errance dans sa bonne ville de Toulouse, tout au long d’une histoire blême à plaisir.
Colin Dexter : Remords secrets (10/18, 415 p., 55 F. traduit de l’anglais par Jacques Guiod.)
L’inspecteur principal Morse, de la police d’Oxford, est diabétique, se pique régulièrement à l’insuline ; toutefois, il boit très régulièrement, depuis l’âge de 14 ans, de la bière par pintes, en général deux, dans les pubs dès leur ouverture, puis termine au whisky chez lui. Depuis peu, il s’est remis à fumer, accélérant ainsi et consciemment le délabrement général de son corps qu’il souhaite d’ailleurs léguer à la science. On comprend dans ces conditions que l’enquête sur l’assassinat, demeuré inexpliqué, d’une sémillante infirmière, soit « son dernier coup d’archet ». Je ne trahis rien de l’histoire en disant que cette treizième enquête sera la dernière. On y retrouve avec plaisir l’inspecteur Lewis, « un homme sous l’influence d’autrui », celle de Morse, son patron. Les rapports ente les deux policiers rappellent ceux de Sherlock Holmes et de son second et dévalué Watson. Rapports humains faits d’amitié qui se refuse à dire son nom, rapports de classe très hiérarchisés qui font l’un des charmes de cette belle et bonne enquête policière, anglo-saxonne et décapante.
Alix Clémence Librairie des Pentes (Zulma- 214 p., 59 F).
J’eusse dû parler en son temps de ce joli polar sur Lyon, paru en septembre 2000. Tout baigné de l’histoire de la ville, entre la colline ouvrière de La Croix-Rousse, et Fourvière « la colline qui prie », entre la terrible répression des armées de la Convention, menées par le représentant en mission de la République, et celle des Canuts. La trame rappelle celle de « L’horloger de St-Paul » Comme dans le film de Tavernier, un oncle boutiquier, qui gère ici une librairie érotique, entretient des relations chaleureuses avec son neveu englué dans une mauvaise passe. Mais l’analogie s’arrête là : dans le roman de Clémence, le neveu est passé de l’autre côté de la barrière des classes, il a rejoint le parti de la bourgeoisie lyonnaise affairiste. Il ne reste plus à l’oncle, ancien militant trotskyste, de se battre dos au mur pour faire éclater la vérité, laquelle va ternir la campagne électorale de la droite. « Entre les nantis et les autres », c’est un combat dont l’issue réjouissante fait chaud au lecteur.
Martine Azoulai La chair des dieux (Série Noire, 216 p. 35 F).
« Mes enfants, on change de boulot. On plie boutique et on écrit des polars » soupire le rédacteur en chef de la République de l’Oise à ses journalistes devant les révélations proprement abracadantesques que distille dans sa feuille le reporter Clara Fontaine. De fait, la jeune femme va de découverte en découverte proprement stupéfiantes : la série de morts sur lesquels elle enquête est liée à l’absorption d’une variété de champignon hallucinogène mexicain par les décédés, substance ayant par ailleurs des propriétés bien particulières que je me garderai bien de dévoiler ici. Quelques épisodes anciens sur le Nouveau monde, où l’histoire a pris corps, majorent le goût corsé de cette dégustation policière.
Les romans de Dessaint se reconnaissent souvent dès les premières phrases : une ligne d’équilibre délicate à tenir entre la trame, vaguement policière, de la fiction, et le soliloque d’un personnage qui aime à se définir ainsi : « Je me faisais l’effet d’un mec qui n’a jamais cessé de courir à sa perte… Je savais, et cela depuis longtemps, que la vie, c’est des riens qui font tout et un peu n’importe comment ». Ainsi, Emile a 37 ans, une petite amie à qui il tient beaucoup plus qu’elle à lui, ce qui le morfond, une épouse très dépressive qu’il visite régulièrement dans la clinique psychiatrique où elle tente de soigner son mal profond, un pote, Frank, peintre marginal et avec lequel il partage des soirées fort alcoolisées, enfin un chien, Tati, qui disparaît et qu’il passe une partie importante du livre à rechercher. Il est compréhensible qu’il ne soit pas réceptif à l’appel au secours de Mary, la nièce de Frank ; et ce n’est qu’aux derniers chapitres du roman qu’il arrive enfin à émerger pour mettre à mal le vilain personnage, cause des malheurs de Mary. Ballotté de personnages en situations plutôt loufoques, Emile trace un parcours d’errance dans sa bonne ville de Toulouse, tout au long d’une histoire blême à plaisir.
Colin Dexter : Remords secrets (10/18, 415 p., 55 F. traduit de l’anglais par Jacques Guiod.)
L’inspecteur principal Morse, de la police d’Oxford, est diabétique, se pique régulièrement à l’insuline ; toutefois, il boit très régulièrement, depuis l’âge de 14 ans, de la bière par pintes, en général deux, dans les pubs dès leur ouverture, puis termine au whisky chez lui. Depuis peu, il s’est remis à fumer, accélérant ainsi et consciemment le délabrement général de son corps qu’il souhaite d’ailleurs léguer à la science. On comprend dans ces conditions que l’enquête sur l’assassinat, demeuré inexpliqué, d’une sémillante infirmière, soit « son dernier coup d’archet ». Je ne trahis rien de l’histoire en disant que cette treizième enquête sera la dernière. On y retrouve avec plaisir l’inspecteur Lewis, « un homme sous l’influence d’autrui », celle de Morse, son patron. Les rapports ente les deux policiers rappellent ceux de Sherlock Holmes et de son second et dévalué Watson. Rapports humains faits d’amitié qui se refuse à dire son nom, rapports de classe très hiérarchisés qui font l’un des charmes de cette belle et bonne enquête policière, anglo-saxonne et décapante.
Alix Clémence Librairie des Pentes (Zulma- 214 p., 59 F).
J’eusse dû parler en son temps de ce joli polar sur Lyon, paru en septembre 2000. Tout baigné de l’histoire de la ville, entre la colline ouvrière de La Croix-Rousse, et Fourvière « la colline qui prie », entre la terrible répression des armées de la Convention, menées par le représentant en mission de la République, et celle des Canuts. La trame rappelle celle de « L’horloger de St-Paul » Comme dans le film de Tavernier, un oncle boutiquier, qui gère ici une librairie érotique, entretient des relations chaleureuses avec son neveu englué dans une mauvaise passe. Mais l’analogie s’arrête là : dans le roman de Clémence, le neveu est passé de l’autre côté de la barrière des classes, il a rejoint le parti de la bourgeoisie lyonnaise affairiste. Il ne reste plus à l’oncle, ancien militant trotskyste, de se battre dos au mur pour faire éclater la vérité, laquelle va ternir la campagne électorale de la droite. « Entre les nantis et les autres », c’est un combat dont l’issue réjouissante fait chaud au lecteur.
Martine Azoulai La chair des dieux (Série Noire, 216 p. 35 F).
« Mes enfants, on change de boulot. On plie boutique et on écrit des polars » soupire le rédacteur en chef de la République de l’Oise à ses journalistes devant les révélations proprement abracadantesques que distille dans sa feuille le reporter Clara Fontaine. De fait, la jeune femme va de découverte en découverte proprement stupéfiantes : la série de morts sur lesquels elle enquête est liée à l’absorption d’une variété de champignon hallucinogène mexicain par les décédés, substance ayant par ailleurs des propriétés bien particulières que je me garderai bien de dévoiler ici. Quelques épisodes anciens sur le Nouveau monde, où l’histoire a pris corps, majorent le goût corsé de cette dégustation policière.