Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace d’expression pour travailler, comme nous y enjoint Jean–Luc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore qu’un libre espace de parole, Notre Monde s’appuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
Retour
© Passant n°37 [novembre 2001 - décembre 2001]
© Passant n°37 [novembre 2001 - décembre 2001]
par Benoit Doche
Imprimer l'articleFrontière…
Punta Arenas, une ville australe
Ville du sud, sud du continent, sud du nouveau monde, sud de la terre
Un bout de géographie à découper pour le traverser
De son flanc s’écoule une terre rouge, une terre couleur de sud : la terre de feu
Punta Arenas, son cimetière aux tombes blanches
Couleurs des derniers arrivants
Un homme de marbre debout, seul, un indien Ona
Son visage a la couleur de la douleur
Les Indiens ne sont plus
Leurs tombes ne sont pas blanches, leurs tombes n’ont pas de formes, leurs tombes ne sont pas
Individus singuliers
Morts violentes
La sépulture d’un peuple noyé dans l’ombre sanglante des frontières
Un peuple dont la peau a tracé des frontières
Une géographie de la mort délimitant des territoires
La limite violente des terres
Un peuple obscurci
Un peuple dont le jour est devenu noir à force de chagrin
La terre de feu rouge du sang des
premiers hommes
Un cri coagulé dans le passé
Le regard de mémoire de la statue
Un génocide et la mémoire
La matière d’un génocide
Départ d’un bord, les lèvres de l’océan pacifique
Une destination atlantique
Un passant chilien
Des cheveux blancs, un regard exilé
Route droite, linéaire
La vue se perd, le lointain n’existe plus
Ici, la terre ne tremble pas
Pas de relief, de la terre ocre, quelques arbustes
La mer à perte de vue, puis la terre, la même terre ocre
Une mer de terre ocre
Un paysage usuel sans gloire
Un paysage habité hors les hommes
Le vent, esprit de ces lieux désolés
Une route bordée de nulle part
Présence du silence
Peu de mots pour couper le vent
Un accident du regard, une estancia aux fenêtres brisées
Un bateau abandonné, une prospérité déchue, des moutons fantômes
Un homme à cheval, un chapeau noir, des chiens, une direction, un point de départ oublié
L’horizon s’écoule dans l’épaisseur de la route
Son sillon est trop large pour les hommes
Le regard s’arrête
Le lointain devient présent
Un point continu
Une ligne imaginaire
Une rupture, un écueil
Un mur pour les chairs
Hors la fraternité
Une lame de silence entre le Chili et l’Argentine
Dans sa transparente permanence
La frontière s’affirme
Recevant sa marque d’encre indolore
Les hommes de la route sauront la
frontière
De chaque côté, un rêve blanc
Une neige sans frontière
Dilatation du temps dans un espace négocié
Décalage entre l’heure chilienne et l’heure argentine
Une heure de vide
L’heure d’un pas suspendu sur la
frontière
Le Chili relâche ses bras gardant mon heure
L’Argentine m’accueille
Les mêmes hommes, les mêmes papiers
Une répétition fantomatique
Un bout de vie décharné
Quittons la frontière
La route demeure bordée du même nulle part ocre
L’homme du passage me résume la frontière : Que mierda !
Ville du sud, sud du continent, sud du nouveau monde, sud de la terre
Un bout de géographie à découper pour le traverser
De son flanc s’écoule une terre rouge, une terre couleur de sud : la terre de feu
Punta Arenas, son cimetière aux tombes blanches
Couleurs des derniers arrivants
Un homme de marbre debout, seul, un indien Ona
Son visage a la couleur de la douleur
Les Indiens ne sont plus
Leurs tombes ne sont pas blanches, leurs tombes n’ont pas de formes, leurs tombes ne sont pas
Individus singuliers
Morts violentes
La sépulture d’un peuple noyé dans l’ombre sanglante des frontières
Un peuple dont la peau a tracé des frontières
Une géographie de la mort délimitant des territoires
La limite violente des terres
Un peuple obscurci
Un peuple dont le jour est devenu noir à force de chagrin
La terre de feu rouge du sang des
premiers hommes
Un cri coagulé dans le passé
Le regard de mémoire de la statue
Un génocide et la mémoire
La matière d’un génocide
Départ d’un bord, les lèvres de l’océan pacifique
Une destination atlantique
Un passant chilien
Des cheveux blancs, un regard exilé
Route droite, linéaire
La vue se perd, le lointain n’existe plus
Ici, la terre ne tremble pas
Pas de relief, de la terre ocre, quelques arbustes
La mer à perte de vue, puis la terre, la même terre ocre
Une mer de terre ocre
Un paysage usuel sans gloire
Un paysage habité hors les hommes
Le vent, esprit de ces lieux désolés
Une route bordée de nulle part
Présence du silence
Peu de mots pour couper le vent
Un accident du regard, une estancia aux fenêtres brisées
Un bateau abandonné, une prospérité déchue, des moutons fantômes
Un homme à cheval, un chapeau noir, des chiens, une direction, un point de départ oublié
L’horizon s’écoule dans l’épaisseur de la route
Son sillon est trop large pour les hommes
Le regard s’arrête
Le lointain devient présent
Un point continu
Une ligne imaginaire
Une rupture, un écueil
Un mur pour les chairs
Hors la fraternité
Une lame de silence entre le Chili et l’Argentine
Dans sa transparente permanence
La frontière s’affirme
Recevant sa marque d’encre indolore
Les hommes de la route sauront la
frontière
De chaque côté, un rêve blanc
Une neige sans frontière
Dilatation du temps dans un espace négocié
Décalage entre l’heure chilienne et l’heure argentine
Une heure de vide
L’heure d’un pas suspendu sur la
frontière
Le Chili relâche ses bras gardant mon heure
L’Argentine m’accueille
Les mêmes hommes, les mêmes papiers
Une répétition fantomatique
Un bout de vie décharné
Quittons la frontière
La route demeure bordée du même nulle part ocre
L’homme du passage me résume la frontière : Que mierda !